« Retour à la religion » d’après Sociovision

 

Entre 2007 et 2012, l’influence de la religion a augmenté de 4 points chez les Français et de 8 points chez les Britanniques. Au Brésil, en Inde et aux Etats-Unis, la religion est bien plus intégrée à la vie quotidienne, mais reflue.

Les débats actuels en France sur l’expression du fait religieux en entreprise interrogent les observateurs étrangers, en particulier lorsqu’ils viennent de pays lointains. L’importance du principe de laïcité dans les fondements de la vie républicaine française est une spécificité parfois difficile à comprendre, tant le rapport à la religion varie d’un pays à un autre.
L’International Observer de Sociovision, dont la dernière vague a été menée en 2012, permet d’illustrer les tendances à l’oeuvre dans onze pays occidentaux et émergents.
Entre 2007 et 2012, l’influence de la religion a légèrement augmenté chez les Français (+ 4 points) et chez les Britanniques (+ 8 points).

La religion influence la vie d’un quart des citoyens en France, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni, et d’un tiers en Italie
Les scores les plus faibles à l’idée selon laquelle « c’est dans la religion que je peux le mieux trouver les réponses aux questions importantes que je me pose » sont recueillis en France (22 %), en Allemagne (20 %), en Espagne (26 %) et au Royaume-Uni (23 %). Des pays européens dans lesquels les Eglises ont progressivement perdu de leur influence au cours des dernières décennies.
En Europe, seule l’Italie résiste à cette érosion avec plus d’un tiers (37 %) des habitants qui adhèrent à cette posture.
On note toutefois un frémissement à la hausse en France (+ 4 points entre 2007 et 2012) et au Royaume-Uni (+ 8 points). « Retour à la religion » également remarqué, dans notre Observatoire France, chez des populations plutôt jeunes et de culture non catholique (religion juive et musulmane principalement).

Une grande intégration de la religion à la vie quotidienne au Brésil et en Inde, mais un déclin rapide
La même question recueille des scores beaucoup plus élevés au Brésil (58 %) et en Inde (54 %) où la religion est beaucoup plus intégrée à la vie quotidienne.
Cependant, la dynamique récente est celle d’un déclin rapide depuis cinq ans : – 13 points au Brésil entre 2007 et 2012, et – 13 points en Inde. Ces pays connaissent à leur tour un processus de sécularisation qui conduit à une perte progressive de l’influence des religions.

Les Etats-Unis dans une position intermédiaire favorable à l’expression des religions
Les Etats-Unis (44 %) apparaissent beaucoup plus proches des postures observées au Brésil et en Inde qu’à celles des sociétés européennes.
L’expression de la religion au travail est beaucoup plus acceptée. Le Premier Amendement de la Constitution reconnaît le droit à la liberté individuelle de pratiquer sa religion. Et les salariés peuvent se retourner contre leur employeur s’ils ont le sentiment d’un comportement discriminatoire à l’encontre de leur conviction religieuse. Nul ne peut, par exemple, se voir reprocher la présence de signes à connotation religieuse (crucifix, voile…), ou l’organisation d’une prière au bureau.

En Chine, l’importance des mouvements philosophiques et spirituels, et la permanence de valeurs traditionnelles
Seuls 36 % des Chinois reconnaissent accorder une importance à la religion. Néanmoins, deux autres items permettent de mesurer la permanence dans ce pays des préceptes de Lao Tseu (66 %) et de Confucius (73 %) en tant que guides et grilles de lecture dans la vie quotidienne d’une grande partie de la population.
Comme les autres BRICK (Brésil, Russie, Inde, Chine et Corée du Sud ou Korea), la Chine développe un modèle de société où l’ouverture rapide à la mondialisation se double d’un maintien de valeurs traditionnelles qui permet de faire perdurer des liens collectifs prégnants. 92 % des Chinois, mais aussi 80 % des Indiens, 78 % des Russes, 72 % des Coréens, et 72% des Brésiliens estiment « nécessaire de respecter les rites et coutumes traditionnels afin de bien vivre ensemble ».

In fine, ces tendances à l’oeuvre dans les différents pays renforcent la spécificité franco-française du débat actuel sur le fait religieux en entreprise. Et interrogent la posture des multinationales françaises qui dialoguent ou souhaitent s’implanter dans les pays non-européens où la religion fait partie intégrante de la vie quotidienne des salariés.

Anne Madelin, directeur conseil, Sociovision

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